•                 Ma mère Aicha (c’est son vrai prénom wallah) rabi yarhamha, racontait chaque soir des histoires à dormir debout, elles ne l’étaient pas pour nous, enfants à l'époque,. Nous, on dormait les yeux ouverts à cause de ses histoires. Elle racontait toujours ou presque les mêmes histoires et nous les adorions. On s'en foutait pas mal pourvu qu'elle n’arrêtait pas de raconter. Une histoire m'a vraiment marqué au point où je voudrai la raconter à mon tour à mes enfants et mes petits enfants. Hélas, ils n'en veulent pas. Ils préfèrent regarder des chaines pour enfant à la télé. Donc j'ai décidé de la raconter ici.
    Il y avait un prince qui vivait dans la fortune de son père, le Roi. Il n'avait qu'à claquer des doigts pour avoir ce qu'il voulait mais il était terriblement triste. Oui, très triste même. Son père le Roi avait fait venir les médecins, les sages et même les mages et les charlatans mais en vain. Un jour, en se promenant aux alentours du palais, le prince rencontra un mendiant qui lui demanda l’aumône. Le prince lui donna une petite pièce et lui demande :
    - Tu es heureux ?
    Le mendiant répond : « Non je ne suis pas heureux, comment veux tu que quelqu’un peut – il être heureux quand il ne trouve même pas à manger dit moi?
    Le Prince soupira longuement alors le mendiant lui demanda ce qu'il avait.
    - « Je suis triste mon ami, je cherche le bonheur. Je suis l’homme le plus malheureux sur terre. » répond le Prince.
    - « Toi tu es triste ? Toi un Prince ? » crie le mendiant.
    - « Oui moi un Prince, je n’ai pas trouvé le bonheur »
    - « Bon ok, dis le mendiant. Puis il continue, je ne suis pas un sage mais je peux donner à sa majesté un conseil. »
    - « Un conseil? bien sur vas y sait- on jamais. On peut trouver dans la rivière ce qu’il n’y a pas dans la mer » dit le Prince.
    - « Il faut que tu portes la chemise d'un homme heureux » dit le mendiant.
            Le Prince prit le conseil au sérieux et s’est mis à chercher dans tous les villages et dans toutes les villes la chemise « magique » qui rendra le prince un homme heureux. Il chercha des semaines, des mois, une année, deux … mais il n’a pas trouvé l’homme heureux qu’il cherchait. Un jour, quand il perdit espoir, adossait à un arbre ; épuisé par la recherche, il entendit un chant qui venait d’un champ de blé. Un homme chantait. Un homme chantait de bonheur. Cet homme était pauvrement habillé. Sa pauvreté se voyait. Alors, notre Prince s’approcha de lui et lui demanda s’il était heureux. Hamdoullah (Dieu merci) je travaille, je mange bien, je dors bien, ma femme et mes enfants sont en bonne santé. Certes, je gagne très peu mais hamdoullah. Alors le Prince sauta sur l’occasion et lui dit: « veux – tu me vendre ta chemise s’il te plait? »
            Mais je ne possède pas de chemise.


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  •      Les deux garçons

           Ma grand mère puis ma mère nous ont racontés cette histoire extraordinaire que nous avons tant aimé et que nous l'écoutions et la réécoutions sans s'ennuyer.  

            On racontait qu'il y avait dans un passé lointain, deux garçons, H'med et Mhamed, deux frères, qui ont grandi ensemble. Ils n'ont jamais connu leur père car il était mort à leur naissance et leur mère a du être la mère et le père en même temps. Il y avait  un secret que seul leur mère connaissait: un des deux garçons était un fils adoptif mais qui ? Personne ne le savait même pas leur mère.

           H'med et Mhamed passait la grand majorité de leur temps à la chasse. Ils avaient chacun un beau étalon, un fusil, un pistolet, un sabre, un épervier et un sloughi, un chien de chasse arabe. Ils partaient très tôt le matin, ils passaient pratiquement la matinée dans la foret et vers midi, ils allaient se reposer et manger dans une clairière où il y avait une source d'eau fraiche. Ils nourrissaient aussi leurs bêtes.

             Le stratagème de la sorcière

           Un jour, pendant qu'ils étaient occupés à tuer les pauvres bêtes, une vieille femme qui avait du plaisir à faire du mal rendit visite à leur mère chez elle. Pendant qu'elles prenaient un café, cette sorcière demanda à la mère si elle connaissait son vrai fils c'est à dire celui qui n'était pas adoptif. La mère s'est mis en colère et lui répondit que tous les deux étaient ses enfants et cela lui suffisait et elle l'a priée de ne plus jamais reposé cette question.

         Quelques jours plus tard, la vieille est revenue revoir la mère. Elle a reposé la même question seulement cette fois, elle a préparé la mère en lui disant que ce n'était pas grave et que c'était juste pour savoir c'est tout. Elle a usé de beaucoup de tact pour arriver à convaincre la mère des deux garçons pour faire la distinction entre les deux. Ainsi, la mère naïvement et poussée aussi par la curiosité, a compris comment faire pour savoir qui est son véritable fils. La vieille méchante ne se fit pas priée, son stratagème était prêt:

    - Quand tu sens qu'ils sont sur le point de rentrer, tu mets un foulard autour de la tête, tu te couches et tu fais semblant d'être malade, ton fils viendra directement te voir et te demander ce que tu as tandis que l'autre, il ne viendra que lorsqu'il dessellera son cheval et donnera à manger à ses bêtes. 

       La distinction

          Une fois que la mère a su qui était son fils biologique, elle ne se comportait plus de la même manière avec les deux garçons. Elle était beaucoup plus intentionnée avec son vrai fils qu'avec l'autre et l'autre l'avait vite compris. 

          Une fois partis à la chasse, pendant le repas de midi, M'hamed, le fils adoptif, déclara à H'med que le comportement de leur mère n'était plus le même et qu'elle n'avait plus de considération pour lui alors il avait décidé de partir très loin. H'med était très surpris :

       - Mais mon frère, tu iras où? C'est ici ton pays, tes amis , ta famille.

       - Ma mère n'est plus ma mère, ma décision est prise, tu vois H'med, cet grand arbre, tant qu'il est vert ton frère, M'hamed, est en bonne santé mais  s'il ne l'est plus, c'est qu'un malheur a frappé ton frère.

             Sur ces phrases, M'hamed prit la route de l'inconnu et laissa son frère en larmes.

           La méduse

            M'hamed et sa petite troupe marchèrent plusieurs jours pour arriver dans un petit village de montagne. Il était loin de son pays natal, très loin. Les villageois l'accueillirent généreusement et lui parlèrent de cette créature fabuleuse qui avait le pouvoir de changer celui qui la regardait dans les yeux en pierre. Une sorte de méduse qui a transformé la moitié des habitants et beaucoup de bêtes en roc. Alors M'hamed leur promis de les débarrasser de cet être maléfique. De nombreuses personnes lui conseillèrent de ne pas y aller mais il n'écouta que son courage. Mais, hélas, parfois le courage à lui seul ne suffit pas ainsi la méduse transforma M'hamed et ses bêtes en pierre.

                                                          H'med au secours de son frère 

               De l'autre coté, très loin, de ce village, H'med s'aperçut que l'arbre dont lui avait parlé son frère était sec alors il comprit qu'un malheur a frappé son frère. Il décida de le rejoindre pour lui porter secours. Il marcha nuit et jour, enfin il arriva au fameux village. Les villageois l'accueillirent généreusement et le mirent au courant. 

     - Demain, j'irai tuer la muse et sauver mon frère, dit - il au sage du village.

    - H'med, tu dois être très prudent sinon tu vas subir le même sort que ton frère, lui déclare le chef du village. Il ne faut pas être téméraire ça ne sert à rien avec la méduse que personne ne peut tuer.

     - Il existe bien un moyen pour arriver à bout de cet être, dit - il.

     - un seul homme peut t'aider, Hamad, cet un vieil hermite qui vit tout seul sur l'autre flanc de la montagne. lui dit le chef.

                                             Le stratagème de Hamad

       Alors le jeune frère et sa petite troupe se dirigèrent vers le taudis où logeait le vieux Hamad. Une fois arrivé, il expliqua à H'med son idée qui était par ailleurs très simple. 

      - Tu dois te munir d'un miroir qui doit te servir à refléter l'horrible image de la méduse ainsi elle sera prise dans son piège: elle va se transformer en pierre. 

     

      


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  •      Pratiquement, chaque samedi je traverse le quartier schettet de Laghouat. Ce quartier où j'ai passé toute ma jeunesse n'existe plus. Ses maisons chaudes en hiver et fraiches en été, ses maisons de terre si douces, si chaleureuses, si accueillantes, avec les arcades, la belle et grande cour où on faisait toujours pousser une vigne grimpante parfois un figuier et à son pied de la menthe où était accroché la guerba n'existent plus.  Ces maisons simples humaines avec leurs petites ruelles parfois en dédales ont été remplacées par des tonnes de béton, des battisses sans âme, inhumaines presque.  

         Ce quartier qui a été toujours mon quartier, le mien, a été vidé de son humanisme, c'est juste du parpaing, du ciment, sans âme où des étrangers à eux même et à moi entrent et sortent. Ce schettet où la totalité des légumes provenaient des jardins allaient dans toutes les maisons. C'était une honte que de vendre un légume. Ce quartier où les hommes et les femmes vivaient en grande famille harmonieuse, cette ville qui se nommait la ville des nobles, n'a plus rien de ce qu'elle a été. Le Schettet a été vidé de sa valeur humaine. C'est devenu un quartier et une ville sans âme.


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  •      Said est un retraité de la santé de la ville de Laghouat. Il a passé plus de la moitié de sa vie à soigner les gens dans un hôpital public. Il a marié tous ses enfants. Il avait  mis de coté une petite somme qui devait lui servir à faire le pèlerinage. Et comme il s'ennuyait de ne rien faire, lui qui a derrière lui une vie pleine, il  reprit le travail dans une clinique privée. Il s'occupait de la rééducation de plusieurs personnes parmi lesquelles il y avait un jeune garçon qui faisait beaucoup d'efforts et qui commençait à marcher un peu. Ce jeune garçon venait avec sa mère et Said faisait du bon boulot. Ils étaient complices. Une fois, à la fin de la séance, la vieille mère du jeune garçon  dit à said:

    - Qu' Allah te garde, Said, mais pour nous ( elle et son fils) c'est la dernière séance.

     Said a voulu savoir pourquoi mais la mère et son fils étaient déjà partis.

    Alors, il a pensé que le service rendu par la clinique n'était pas satisfaisant.

    Pendant ce temps des amis ont procuré un passeport spécial pèlerinage à notre fameux Said. C'était le plus beau cadeau pour lui car son souhait le plus cher était d'aller aux lieux saints avant de mourir. Il était décidé à y aller.

      Mais ce que lui avait dit la mère du garçon le faisait réfléchir alors il est allé à l'administration pour s'informer, alors il a su la vérité assez difficile à digérer: la mère voulait dire qu'elle n'avait plus les moyens pour payer les séances de rééducation à son fils.

      Ce jour là Said est rentré chez lui plus tard que d'habitude. Il n'était pas bien du tout. La nouvelle qu'il venait d'apprendre lui faisait mal, très mal. Il pensait beaucoup. Il se demandait s'il n' y avait pas de solution et le sort du jeune garçon pesait très lourd sur ses épaules. Il se sentait un peu responsable. En tout cas, il était impliqué jusqu'à la moelle. 

       Une fois chez lui, il était assez taciturne et sa femme sentait que quelque chose ne tournait pas rond. Il avait passé la soirée dans sa chambre. Seul, silencieux. Il réfléchissait. Il avait très mal dormi. Il cherchait une solution mais en vain. Le matin, sa femme, au courant de ce à quoi il pensait, lui  proposa d'aller voir le directeur peut être qu'il trouverait quelque chose. Mais le directeur lui  répondit qu'il ne pouvait rien faire , que lui même n'était qu'un employé et qu'en réalité il ne pouvait pas faire du social car il dirigeait un établissement qui doit être rentable.

        Il était rentré chez lui  fourbu, abattu, et surtout incapable d'aider ce garçon. Il avait passé une nuit blanche et le matin, il était décidé à utiliser les grands moyens. Il  prit à la hâte un café et se  dirigea vers la clinique. Une fois arrivé, il alla à l'administration paya avec l'argent qui devait lui servir au pèlerinage six mois de soins au jeune garçon et pria le comptable de garder le secret. Il se sentait soulagé. Il respirait mieux. Il était heureux d'avoir accompli un devoir, d'avoir accompli quelque chose de vraiment bien, il a rendu l'espoir à une personne qui l'avait perdu. 

         Il rentra chez lui, fit ses ablutions et se mit à prier  Allah.

        Quelques jours plus tard, le directeur l'appela. 

         En route, Said pensait qu'il devait y avoir un pépin mais son supérieur ne l'avait jamais appelé en urgence. «Ai - je commis une erreur ou peut etre une faute sans le savoir?»  pensait - il. Le chemin vers la clinique est devenue subitement long très long. Said s'impatientait.

        Une fois arrivé, tout se passa rapidement. Il était debout dans le bureau du directeur qui mettait un temps fou à parler et Said était accroché à ses lèvres. Il ne respirait plus. Il allait s'étouffait, lui un homme compétent et intègre qui n'avait jamais manqué à son devoir jamais. Enfin, le directeur l'invita à s'asseoir. 

         - Said, j'ai besoin de toi, le propriétaire de la clinique m'a téléphoné ce matin.

       Ça doit être grave. J'espère que ce n'est pas à cause de moi, pensa Said.

        Le directeur enleva ses lunettes, regarda son interlocuteur dans les yeux, il était décidé à parler. Il mit quelques secondes avant de dire :

          - Le propriétaire de la clinique va aller cette année en pèlerinage et comme il est malade, il a besoin d'un assistant médical, son infirmier habituel est parti en retraite alors j'ai pensé à toi. Qu'en penses tu?

          Ces paroles étouffaient Said. Il ne savait plus parler. Son cœur battait très fort. Il lui a fallu quelques bonnes minutes pour reprendre ses esprits et comprendre la situation.

       - Said, tu es l'homme de la situation. Tu veux peut être avoir  du temps pour réfléchir? 

         Sur ces paroles le directeur quitta son bureau pour laisser Said tout seul. Dix minutes après , le directeur revint et dit à Said qu' il s'agit là d'une chance pour lui de faire le pèlerinage et que tout sera payé bien sur en plus , il sera lui même payé alors Said sortit de son silence:

       - Non, non pas question que je sois payé, le pèlerinage me suffit.

       Tout fut arrangé et ils ont accompli le pèlerinage. 

       De retour, le propriétaire de l'hôpital,  sur la proposition de Said, a créé une caisse de solidarité pour les nécessiteux dans laquelle sera versé 5 % du revenu de la clinique.

         Said remerciait Allah car il a réussi trois bonnes actions. D'abord, il a accompli l'un des piliers de l'Islam. Puis, il a aidé un malade dans les lieux saints . Enfin et surtout , il a réussi quelque chose de vraiment extraordinaire, il a été la cause direct de la création de la dite caisse de solidarité.


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  •          Mardi c'est le jour du marché spécialement des bestiaux à Laghouat. Comme l'Aid Aldha ( fête du sacrifice) n'est pas loin, je suis allé jeter un coup d'œil pour voir surtout les prix. J'ai remarqué qu'il n'y avait presque pas de krouf ( jeune mouton mâle) ni de kabech ( bélier) dans le souk alors j'ai demandé à certains vendeurs quelle en était la raison. A l'unanimité, on m'a répondu qu'on les gardait pour l'Aid pour les revendre bien sur, au triple de leur prix réel, voire plus. Une réponse assez pertinente et surtout très significative m'a été donnée par un vieil homme « ils les gardent pour nous faire saigner et se remplir les poches mais mon fils, ils ne gagneront rien du tout car bien mal acquis ne profite jamais.» Mais "ils" c'est qui? Les éleveurs? les revendeurs? Alors sans hésiter, ce vieil homme m'a répondu qu'il ne s'agissait point des éleveurs, eux, les pauvres, ils n'ont que les emmerdements. Il s'agissait bien des revendeurs dont certains ont fait le plein de moutons. Ils ont ramassé tous les kroufs et les akbachs en attendant de les revendre bientôt pour l'Aid. Ce sont ces sangsues qui sont les premiers responsables de la flambée des prix des moutons à l'approche de la fête. Ce sont ceux là qui dépècent les gens  et qui font que le meskine ( pauvre) à défaut d'acheter un mouton à ses enfants et faire la fête, il doit se contenter de le dessiner.

     


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