• Le moineau

             Le texte que vais publier ici a été écrit par mon ami et camarade de classe Lazhari Labter, écrivain, poète et journaliste de Laghouat , de renommée internationale. Ce récit m'a  plu bien sur, mais il m'a fait revivre des moments de mon enfance que l'auteur décrit si bien que je m’identifie à lui.

        « Je me souviens que par jeu et aussi poussé par le besoin de manger de la viande, un luxe pour les pauvres à l’époque, nous pratiquions la chasse aux moineaux, aux tourterelles, aux étourneaux. Nous utilisions pour cela aussi des pièges que la tire boulettes.

        Tapi sous un arbre, j’attendais que l’oiseau, attiré par la nourriture, une datte ou un petit morceau de pain, s’approche du piège. Cela pouvait durer des heures sans qu’aucun volatile ne daigne faire honneur à la nourriture. Parfois, l’oiseau se posait, tournait autour du piège mais, comme s’il doutait de quelque chose, ne touchait pas à l’appât. Dans ces moments d’intense émotion, le cœur battant, à voix, nous répétions inlassablement cette formule magique : « Zid Khtaouia yarham taioua, Zid Khtaouia yarham taioua » qu’on pourrait traduire par : « Encore un petit pas, bénie soit Taouia » Qui était Taouai ? C’était le dernier de nos soucis, tout ce qui nous intéressait c’était que l’oiseau soit pris.

           J’étais particulièrement adroit à la tire boulettes. Avec la tire boulettes à petite élastique, j’étais capable de faire voler une pièces de monnaie tenue entre le pouce et l’index par un compagnon de jeu qui se tenait debout à dix mètres, le dos tourné pour éviter le visage en cas de mal visé. Je manquais rarement ma cible. Cet exploit répété me valait l’admiration de tout le quartier. J’en étais très fier.

              Un jour que j’avais réussi à attraper un moineau vivant, je voulus le passer par le fil du couteau avant de le braiser car il n’était pas question de manger un animal dont le sang n’avait pas coulé. C’était Haram, interdit par notre religion. Je me munis d’un couteau et, dans un coin du jardin, je sacrifiais au rituel. Quand je posai le moineau,à ma grande surprise, le moineau s’envola et alla se poser sur un arbre, hors de ma portée. J’en fus très chagriné, non de l’avoir perdu mais de l’avoir ainsi blessé et causé des souffrances inutiles. Pendant des semaines, l’image de ce pauvre oiseau, blessé me tourmenta. J’en étais malade.

        Je finis par l’oublier mais après cet incident, je décidais de ne plus m’adonner à la chasse. Je trouvais un plus grand bonheur dans le spectacle des oiseaux jouant et pépiant dans les arbres ou faisant la fête dans le ciel.»

                          Lazhari Labter in « Retour à Laghouat mille ans après Beni Hilel »

    Source : http://www.sidielhadjaissa.com/article-27182923.html

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